Huit heures. Pas le temps de reprendre
l’interrogatoire de la fille. Coup de théâtre. Une voiture accidentée signalée
sur la route des sables blancs, le conducteur affalé sur le volant, mort, une
balle dans la tête. Les traces sur la
carrosserie et les marques de freinage suggèrent que l’assassin a dû dépasser
le véhicule de la victime en le serrant
jusqu'à lui faire mordre le bas côté et l'obliger à s'arrêter, puis il est
descendu et l’a abattu.
Ben voilà le troisième, dit le commissaire.
Le dessin du chien est agrafé sur la veste de la victime, même coup de pinceau,
même artiste. Une valise dans le coffre, tiens, Ronan Legarrec partait en
voyage ou s’éclipsait parce qu’il avait compris que son tour était venu. Son excursion sera plus longue que prévue et
sans billet de retour.
Seul hic pour Martin, le légiste certifie
que la mort remonte à une heure du matin, il est formel, or, Mona Louarn a
passé la nuit au violon. Il se frotte les sourcils.
Merde alors, commente Tronchard, c’est pas
elle !
De son côté, Muriel a pris la route de Pen
Ker Traon de très bonne heure ce matin, après avoir passé la nuit à éplucher
les articles et tout ce qu’elle a pu trouver sur l’accident de Pierrick Louarn
et le décès de sa voisine Maria, des faits concomitants qui ne semblent pas
avoir éveillé de soupçons à l’époque. Au domicile de Pierre Louarn, le père du
type qui est censé s’être tué en moto, personne. Mais elle est intriguée par
l’appentis, adossé à la maison, tout vitré, ce qu’elle peut voir à l’intérieur
est édifiant, un atelier de peintre, des toiles en cours, sur chevalet. Elle
fonce au commissariat faire son rapport.
Dix heures, une lettre arrive avec le courrier,
déposée pendant la nuit dans la boîte, elle est destinée au commissaire. Elle
est signée Pierre Louarn, il s’accuse des trois crimes, sa vengeance accomplie,
il déclare vouloir disparaître en mer. Il a pris le large dans la nuit, à bord
de son voilier.
Mona Louarn à priori disculpée. Pourtant,
Martin continue à avoir des doutes, se demande si le grand-père et la petite-fille
ne sont pas de mèche. Si le vieux n'a pas simplement achevé le travail commencé
par sa petite fille. Comment savoir ? Il livre ses soupçons au juge qui
l’envoie paître. Vous lisez trop de romans, mon vieux, ce ne sont pas des
crimes de jeune fille, persifle le magistrat pour qui l’affaire est bouclée, un
mandat de recherche du criminel est lancé. Il n'a pas besoin de se compliquer
la vie avec deux coupables, il en a assez d'un.
Il conseille à Mona Louarn de ne pas traîner dans le patelin
et recommande qu’elle soit protégée
jusqu’à Rosporden où elle prendra le TGV pour Paris.
Le commissaire l’accompagne d'abord à
l’hôtel récupérer ses affaires. Dans la rue, un incident se produit sous son
nez, qui pourrait l'intéresser s'il n'avait l’esprit ailleurs. Il ne prête pas
assez attention à la femme qui trébuche au moment où elle les croise et
s’agrippe à Mona qui la retient in
extremis.
Sur le quai, le policier songeur, convaincu
qu’une part de la vérité lui échappe, emportée par ce train, le regarde disparaître
à regret.
Mona,
appuyée à la fenêtre du compartiment, contemple le paysage de bocage breton qui
s’enfuit. Un peu nostalgique. L’océan lui manquera. Dans quelques heures, elle
s’envolera pour la Sicile, mais ses racines sont ici, un jour elle y reviendra.
Elle décachette la lettre que la femme sur
le trottoir a glissé dans sa poche et sourit.
« Je
fais route vers Syracuse, j’y serai dans cinq ou six semaines, si les vents sont
avec moi. Ton grand-père »
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