Traduction

mercredi 8 novembre 2017

Livresse du noir



L’affaire Jane De Boy – Simone Gélin


Et s’il n’en restait qu’un…
J’avoue, mea culpa, que je ne connaissais pas Simone Gélin avant de la rencontrer au festival Toulouse polars du sud, où elle a d’ailleurs reçu le prestigieux Prix de l’embouchure.  Rentrée à Bruxelles avec son livre en main, je n’ai pas tardé à le lire, toute excitée à l’idée de le découvrir.
Et maintenant… me voilà bien embêtée pour vous en parler, je sais que mes mots ne seront pas à la hauteur de mon ressenti.
(Une petite parenthèse « coup de gueule » pour toutes les personnes (c’est à dire la majorité !) qui ont parlé de ce livre en spoilant l’histoire et pas qu’un peu, non 100% spoil !!! C’est de l’inconscience, je m’en tiendrai à ça pour rester polie. De grâce, ne lisez donc pas les chroniques avant d’ouvrir ce roman.  Je referme la parenthèse.)
Un très beau roman qui nous plonge dans de tristes évènements d’un passé pas si lointain et gardé sous silence.  D’un côté, les années cinquante en Espagne, les horreurs méconnues et taboues du régime franquiste. Abril nous les raconte sous forme de journal.  De l’autre, en 1960 à Bordeaux, le quartier Saint Michel ‘la petite espagne’ et le bassin d’Arcachon. Un couple d’immigrés espagnols s’y est installé et mène une vie tranquille.  Leur petite fille de trois ans disparait sur la plage en face de chez elle, à quelques mètres de sa mère.   Le commissaire Lasserre mène l’enquête avec son ami Hippolyte, un vrai casse tête, l’enquête piétine de fausses pistes en fausses pistes et se complexifie au fil des jours.
Simone Gélin nous immerge complètement dans l’ambiance de cette époque.  Les deux histoires s’imbriquent et alternent au fil d’un récit dynamique pour finir par se rejoindre dans un final bouleversant, chargé d’intenses émotions.
Un remarquable polar noir, un roman historique, un documentaire. Et surtout un roman résolument féminin, l’auteure porte un regard bienveillant sur ces tragiques évènements. Une belle ode au courage de milliers de femmes et deux magnifiques portraits de femmes.
Une intrigue solide et passionnante que j’ai eu du mal à lâcher tant j’avais envie d’en connaître le dénouement et pourtant j’ai ralenti, j’ai posé ma lecture plusieurs fois pour apprécier la profondeur de cette histoire.
L’affaire Jane De Boy est un roman si ‘particulier’ et Simone Gélin, une auteure bourrée de talent.  J’ai aimé sa sensibilité à fleur de peau, sa douceur, sa délicatesse, sa subtilité, sa puissance.  J’ai aimé ses contrastes, sa noirceur et sa lumière. J’ai aimé sa plume magnifique, d’une beauté poétique et musicale, la construction de ses phrases, les respirations entre les mots.
J’ai tourné la dernière page envahie d’émotions, la gorge nouée, le coeur serré, les larmes au bord des yeux, Simone Gélin m’a touchée au delà de tout, son roman me hantera longtemps. Je la remercie de tout coeur.
Coup de coeur pour ce sublime roman.  A lire absolument !

4ème Couverture
En 1960, dans le village de Jane de Boy, une petite fille de 3 ans disparaît sur la plage. Enlèvement ? Crime politique, passionnel, crapuleux ? Qu’est venu faire en France ce jeune couple d’Espagnols, Felix et Justina ? Que sait Sarah, la voisine, prostituée du samedi soir ? Le commissaire Lasserre s’interroge, aidé par son vieux camarade Hippolyte. L’enquête se déroule à Bordeaux, dans l’ambiance du mythique hôtel de police de Castéja, au coeur du quartier Saint-Michel, dans les ruelles de la petite Espagne, au marché des Capus… Et se corse aux bassins à flot.
Editeur: Vents Salés, 420 pages, date sortie: 13 mai 2016


jeudi 2 novembre 2017

Patrick Senécal



http://www.patricksenecal.net/romans/


J'ai rencontré Patrick Senécal au festival Toulouse Polars du Sud. 




Son roman L'Autre Reflet, traite du sujet de l'écriture du polar ou roman d'horreur et pose toute les bonnes questions, notamment celle de la description de la violence, comment en rendre compte, avec les mots adéquats, pertinents, sans tomber dans le cliché, l'enflure ou la platitude ?

Patrick nous fait entrer dans la tête et la peau du personnage auteur de polar et l'on ne peut plus en sortir ni poser le bouquin. Obsédant, haletant, et toujours terriblement juste. 




Je lui ai posé quelques questions et il a gentiment accepté de me livrer ces confidences :



Pourquoi écris-tu des polars ?

J’écris en fait des romans noirs: parfois horreur, parfois polar, parfois horreur… Pourquoi? Au départ, c’était pour le plaisir de raconter une histoire haletante, le plaisir de manipuler de lecteur, de jouer avec ses émotions. Mais peu à peu, je me suis rendu compte que c’était un bon moyen d’explorer notre inconscient, notre noirceur intérieure, la bête qui sommeille en nous et qui peut surgir suite à un événement particulier… Ça devient un miroir du pire de l’humain. Et puis, disons-le: les drames permettent de meilleures histoires que le bonheur. De plus, je suis avant tout un raconteur, un story-teller, pas un grand styliste littéraire. Le roman noir me sied donc parfaitement. 


As-tu choisi de le faire ou cela s'est-il imposé ?

Je pense que cela s’est imposé. J’ai lu de l’horreur et du fantastique à onze ou douze ans, et je me suis aussitôt dit: je veux écrire ça. Ça été aussi naturel, aussi instinctif que cela. Il m’arrive d’écrire d’autres choses, mais dans ces cas-là, je dois obliger mon imaginaire à aller ailleurs, et j’aime beaucoup explorer d’autres facettes de mon imaginaire. Mais si je laisse mon imaginaire vagabonder, les idées qui me viennent naturellement à l’esprit sont noires et violentes. Mais comme j’ai beaucoup de succès au Québec, il y a le risque du confort et de la répétition: je dois éviter cela. 


Que cherches-tu à travers cette écriture ?


Je crois qu’écrire sur la noirceur humaine, c’est un moyen de parler de mes propres peurs. Et, par le fait même, de les juguler un peu. Du moins, cela me donne l’impression que je contrôle ces peurs jusqu’à un certain point. C’est un moyen de nourrir ma propre bête intérieure, de la nourrir juste assez pour qu’elle demeure docile et calme. 

article de presse




Le 6 novembre






Lundi, au capitole




Le prix de l'Embouchure me sera remis à la mairie.