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mardi 16 janvier 2018

Suite

Troisième épisode

Lendemain matin. Mona, cinglée par le grain, doit se ramasser pour avancer, contre le vent debout. La tempête produit toujours sa musique : ronflement sourd et continu de l’océan, hurlement aigu des rafales qui s’engouffrent dans les rues et claquement des haubans contre les mâts. Le commandant lui a dit qu’elle trouverait Lebreton sur le port, il n’a pas dû sortir en mer avec ce temps de chien. Elle repère le chalutier : Le Brocéliande. Un homme vêtu d’un ciré s’active sur le pont.
Je pourrais vous parler, monsieur Lebreton ?
Il lève la tête, plisse les yeux, fouille sa mémoire… Il doute. Les fantômes, il n’y croit pas.  Il se pince plusieurs fois.
Mona impassible. Elle dit qu’elle est venue partager avec lui une histoire qu’elle se raconte la nuit, depuis vingt ans. Celle d’une petite fille de cinq ans qui regarde par une fenêtre et qui voit une bande de garçons, trois jeunes hommes, sortir comme des criminels de la maison voisine, portant des paquets rectangulaires, enveloppés dans des chiffons. Elle s’arrête là, attend qu’il continue, curieuse de connaître la suite. Là, Lebreton ne peut plus déglutir, il s’étrangle carrément avec ses souvenirs.

Au même moment, rue de la gare, c’est le branlebas. Le feu aux fesses, les flics sautent dans leurs bagnoles. Tanguy Leguen découvert ce matin, occis et déjà froid, dans son mobil home. L'assassin n'est pas un apprenti, une seule balle a visé le cœur. Pas de désordre apparent, qu’aurait-on pu vouloir voler ici, d'ailleurs ? Le commissaire Martin pense à un règlement de comptes entre voyous, Leguen n’était pas un saint. Il explore le logis, son attention attirée par un dessin cloué au mur par un couteau de cuisine, représentant un drôle de chien. Un chien jaune. Il le rafle, sans savoir pourquoi, peut-être parce qu'il n'a rien d'autre à se mettre sous la dent.
Le bal des voitures de police, du SAMU, et l’agitation inhabituelle n’ont pas échappé à la clientèle du bar du port. En moins d’une heure, la nouvelle de l’assassinat se répand comme de l’encre de seiche sur le quai et sur la ville.

Vers vingt-deux heures, Mona qui déambule dans la ville close, se souvient brusquement en passant devant une crêperie qu’elle n’a rien avalé depuis la veille.

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